Passer au contenu principal

Avant de partir, Valérie Plante, s.v.p.!

Après avoir réalisé deux mandats comme mairesse de Montréal, Valérie Plante a annoncé qu’elle ne sera pas des prochaines élections municipales en novembre 2025. Rappelons que lors de sa première élection, en 2017, Valérie Plante devenait la première femme élue mairesse de la ville de Montréal. Ce n’était pas rien. C’était même tout un exploit ! Comme femme et comme féministe, plusieurs d’entre nous étions extrêmement fières de cette réalisation, une première femme à la tête de la métropole, même si elle se présentait comme « l’homme de la situation ». Pas grave, la stratégie « marketing » a fonctionné. Vive l’émancipation des femmes ! 

De plus, cette femme énergique au rire décapant et incomparable a eu raison de Denis Coderre. Ataboy. (Atagirl ? Peu importe). Bref, nous vous disons bravo et merci, Madame la mairesse de Montréal, d’avoir servi les Montréalaises et les Montréalais pendant deux intenses mandats, et ce, contrairement à votre imbuvable et arrogant prédécesseur, avec une attitude hautement plus agréable et le sourire. 

Maintenant, avant que vous quittiez définitivement vos fonctions à la ville de Montréal, on aimerait un geste clair de votre part, concernant une demande faite maintes fois, au cours des derniers mois, et malencontreusement restée lettre morte. 

Depuis l’été dernier, en effet, nous avons été nombreux à exprimer clairement notre désaccord avec ce panneau de bienvenue à l’entrée de l’hôtel de la ville de Montréal. Plusieurs personnes se sont exprimées à ce sujet sur diverses tribunes, des plaintes ont été envoyées à la Ville de Montréal, et pourtant, rien n’a été fait. (Hier encore, ce panneau demeurait bien visible à l’entrée.)

Ce panneau de bienvenue controversé qui accueille les visiteurs à l’entrée de l’hôtel de ville de Montréal, faut-il le rappeler, ne fait clairement pas l’unanimité. Tant s’en faut. La seule femme qui apparait sur ce panneau insipide étant une femme voilée, le malaise est immense et l’indignation, elle, bien réelle. Devons-nous également réitérer, pour la énième fois, que l’image de « la femme voilée », devenue malheureusement le symbole de la « diversité » à tout prix et d’un multiculturalisme fédéraliste canadien apparemment réussi, est en réalité une très mauvaise idée. 

Non seulement les vêtements religieux en général sont incompatibles avec le féminisme (qui vise l’égalité des sexes et l’émancipation des droits des femmes partout sur la planète), mais ces interminables représentations visuelles de « la femme voilée », qui se multiplient partout dans l’espace public québécois, ne font que normaliser, voire banaliser un instrument d’oppression utilisé contre les femmes, et que des millions de femmes dénoncent déjà à travers le monde – soulignons au passage, entre autres exemples, la militante iranienne Narges Mohammadi, Prix Nobel de la paix 2023, emprisonnée dans son pays en raison de son courageux combat contre le voile obligatoire pour les femmes et contre la peine de mort en Iran.

Bon nombre de citoyennes et de citoyens, femmes et hommes, ainsi que diverses associations et organisations, pour des motifs féministes, laïques ou autres, ont déjà exprimé leur opposition et leur mécontentement face à l’utilisation de cette image de femme voilée par la Ville de Montréal. Plusieurs d’entre nous sommes en réalité outrés de voir que le voile islamique est de nouveau utilisé, mis de l’avant, voire célébré, alors que nous avons pourtant choisi, comme peuple, de vivre dans une société laïque et égalitaire au Québec. En plus d’être une image hautement illogique et inconséquente avec nos propres valeurs et choix de société, la majorité des femmes, montréalaises comme québécoises, ne se reconnaissent aucunement dans cette représentation religieuse, sexiste et réductrice des femmes. 

Ainsi donc, Madame Valérie Plante, avant de quitter la mairie de Montréal, pourriez-vous s’il vous plait être « la femme de la situation », avec votre rire contagieux, votre colonne vertébrale et vos précieuses gonades, et retirer une fois pour toutes ce ridicule panneau de bienvenue misogyne et discriminatoire qui célèbre la subordination des femmes ? À l’avance, on vous remercie.

-----

Photos : Sylvie Marchand, Le panneau de bienvenue faisant la promotion de la soumission des femmes à l’hôtel de ville de Montréal, 25 oct. 2024.

***

À lire : Des mises en garde venues de France (Le Devoir, 26 oct. 2024)

« Il en veut aussi à une certaine gauche qui aurait oublié ses origines et ses valeurs et qui refuse de condamner ce qu’hier encore elle aurait condamné. Il écrit : "On assiste (à un) grand retournement idéologique (...) qui amène les féministes à défendre le voile islamique, symbole d’infériorité des femmes et autres billevesées cautionnées par d’ardents universitaires (...). Et les prétendus héritiers de Jaurès abandonnent le drapeau de la laïcité." »

***

** AJOUT (28 oct. 2024) - Bonne nouvelle ! Lors de son passage à l'émission Tout le monde en parle, hier soir, la mairesse Valérie Plante a annoncé que ce panneau sexiste sera sous peu retiré : L'affiche représentant une femme voilée sera retirée (La Presse, 28 oct. 2024)

Messages les plus consultés de ce blogue

Le Prince et l’Ogre, le mauvais procès

Poursuivi en justice pour des agressions sexuelles et des viols qu’il aurait commis à l’endroit de plusieurs femmes, un homme connu du grand public subit un procès. Dans le cadre de ces procédures, des témoins défilent à la barre. Parmi ceux-ci, des amis de longue date, des proches, des collègues et d’anciens collaborateurs venus témoigner en faveur de l’accusé. Tous soulignent sa belle personnalité, le grand homme qu’il a toujours été. Ils le connaissent bien ; cet homme n’est pas un agresseur. Au contraire, il a toujours joui d’une excellente réputation.  C’est un homme « charmant, courtois, poli et respectable » tant envers les hommes que les femmes, répéteront-ils. Il est « un peu flirt », certes, « comme bien d’autres ». Mais personne n’a souvenir qu’on ait parlé en mal de lui. Jamais. Parfois, il est vrai, il a pu se montrer insistant envers quelques femmes, affirmera lors d’une entrevue un excellent ami depuis le Vieux Continent. Mais on pa...

Les Grands Ballets canadiens et la guerre commerciale américaine

La guerre commerciale «  made in USA  » est commencée. De toutes parts, on nous invite à boycotter les produits et les services américains. Quoi ? Vous songiez aller en vacances aux États-Unis cette année ? Oubliez ça ! Il faut dépenser son argent au Canada, mieux encore, au Québec. Dans ce contexte, on nous appelle également à boycotter Amazon (et autres GAFAM de ce monde) ainsi que Netflix, Disney, le jus d’orange, le ketchup, le papier de toilette, etc. – nommez-les, les produits américains –, en nous proposant, et ce un peu partout dans les médias québécois, des équivalents en produits canadiens afin de contrer la menace américaine qui cherche ni plus ni moins à nous affaiblir pour ensuite nous annexer. Les Américains sont parmi nous  Pourtant, les Américains sont en ville depuis longtemps. Depuis 2013, en effet, les Grands Ballets canadiens de Montréal (GBCM) offrent une formation américaine ( in English, mind you , et à prix très fort qui plus est) sur notre territo...

«Boléro» (2024), l’art de massacrer la danse et la chorégraphe

  Réalisé par Anne Fontaine ( Coco avant Chanel ), le film  Boléro  (2024) porte sur la vie du pianiste et compositeur français Maurice Ravel (Raphaël Personnaz) durant la création de ce qui deviendra son plus grand chef-d’œuvre, le  Boléro , commandé par la danseuse et mécène Ida Rubinstein (Jeanne Balibar). Alors que Ravel connait pourtant un certain succès à l’étranger, il est néanmoins hanté par le doute et en panne d’inspiration.  Les faits entourant la vie de Maurice Ravel ont évidemment été retracés pour la réalisation de ce film biographique, mais, étrangement, aucune recherche ne semble avoir été effectuée pour respecter les faits, les événements et, surtout, la vérité entourant l’œuvre chorégraphique pour laquelle cette œuvre espagnole fut composée et sans laquelle cette musique de Ravel n’aurait jamais vu le jour.  Dans ce film inégal et tout en longueur, la réalisatrice française n’en avait clairement rien à faire ni à cirer de la danse, des fai...

«La Belle au bois dormant», y a-t-il une critique de danse dans la salle ?

«  Sur les planches cette semaine  » …  «  La Belle au bois dormant  est un grand classique et, en cette époque troublée, anxiogène, la beauté des grands classiques fait du bien à l’âme. Particularité de la version que présentent les Grands Ballets à la Place des Arts cette année : c’est un homme (Roddy Doble), puissant, imposant, sarcastique, qui interprète la fée Carabosse, comme l’a voulu la grande danseuse et chorégraphe brésilienne Marcia Haydée » écrit la journaliste Marie Tison, spécialiste en affaires, voyage et plein air dans La Presse .  Qu’est-ce qui est pire ? Une compagnie de ballet qui produit encore des œuvres sexistes et révolues ? Un homme qui joue le rôle d’une femme (fée Carabosse), rôle principal féminin usurpé à une danseuse ? Ou une journaliste qui ne connait absolument rien ni à la danse ni aux œuvres du répertoire classique, incapable du moindre regard ou esprit critique, qui signe constamment des papiers complaisants de s...

Je me souviens... de Ludmilla Chiriaeff

(photo: Harry Palmer) La compagnie de danse classique, les Grands Ballets canadiens, a été fondée par une femme exceptionnelle qui a grandement contribué à la culture québécoise, Ludmilla Chiriaeff (1924-1996), surnommée Madame. Rien de moins. Femme, immigrante, visionnaire Née en 1924 de parents russes à Riga, en Lettonie indépendante, Ludmilla Otsup-Grony quitte l’Allemagne en 1946 pour s’installer en Suisse, où elle fonde Les Ballets du Théâtre des Arts à Genève et épouse l’artiste Alexis Chiriaeff. En janvier 1952, enceinte de huit mois, elle s’installe à Montréal avec son mari et leurs deux enfants – elle en aura deux autres dans sa nouvelle patrie. Mère, danseuse, chorégraphe, enseignante, femme de tête et d’action, les deux pieds fermement ancrés dans cette terre d’accueil qu’elle adopte sur-le-champ, Ludmilla Chiriaeff est particulièrement déterminée à mettre en mouvement sa vision et développer par là même la danse professionnelle au Québec : « Elle p...