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On est rendus là, les mecs, et même qu’on est plus que prêtes : on a besoin d’une femme pour occuper le siège de fou du roi.
Appelez-la la folle du roi, la bouffonne, la smatte ou la gossante, qu’importe, on a besoin de voir et d’entendre une femme à la gauche du grand patron. Et apparemment, on est justement à l’heure des grands changements.
En 2017, on écrivait que les émissions d’actualité étaient toutes animées par deux hommes (Deux hommes en or, deux femmes invisibles).
Depuis, les Francs-tireurs ont disparu (c’est triste mais que voulez-vous, c’est Télé-Québec qui a tiré sur la plogue), Deux hommes en or ont recruté une (beaucoup trop) jeune femme (bravo pour l’effort, les boys, mais c’est poche à mort cette disparité), et maintenant voilà qu’une belle opportunité se présente enfin sur le beau plateau du rendez-vous dominical. Alors moi je vous dis, let’s go messieurs (et mesdames), foncez.
On a besoin de s’entendre, nous, les femmes. On a besoin de se sentir représentées dans les enjeux d’actualité. Cela ne signifie pas seulement d’entendre une voix féminine mais aussi d’offrir et d’explorer un autre point de vue, une autre perspective. Car évidemment, les femmes et les hommes ne pensent pas de la même façon ni aux mêmes choses. Nul besoin d’expliquer ça au créateur de Un gars, une fille.
Anaïs Favron a été merveilleuse jusqu’à présent dans son rôle de folle du roi, et en plus elle a 44 ans (selon Wikipédia). (Ne nous arrivez surtout pas avec une gentille fillette naïve et innocente qui ne connaît rien et qui ne fait pas le poids, on ne vous le pardonnera pas.)
Vous voulez faire passer le test/l’entrevue à d’autres femmes ? Pas de problème, allez-y, mais, mais, souvenez-vous qu'au final ça nous prend une femme.
Essayer d’autres humoristes masculins ? Non merci. Ils sont partout, à la télé comme à la radio, tout le temps, constamment, et on en a royalement marre de ces gros ego masculins qui s’aiment un peu, beaucoup, à la folie, de ces hommes qui adorent s’écouter parler. Fuck that.
Qui plus est, on est au XXIe siècle, bordel, et pourtant, rarement peut-on avoir la perception, l’opinion et les interventions d’une femme insoumise et un tantinet baveuse sur un grand plateau de télévision pour commenter des sujets d’actualité.
Oui, avec une femme dans ce rôle de bouffonne, ça va brasser. Oui, il y aura de la bisbille, de la misogynie, des insultes, des commentaires sexistes, nauséabonds et passés date, car une femme qui dérange est forcément dérangée.
Mais l’évolution vous appelle, messieurs les producteurs, rien de moins. Et plus il y aura de femmes pertinentes, expérimentées et impertinentes dans l’espace public pour commenter l’actualité et bousculer les normes, mieux la société s’en portera. C’est un réel investissement, garanti. Et la diversité des voix commence par entendre celles des femmes, cette majorité silencieuse car encore et toujours sous-représentée.