Au début de ce Grand Confinement, la fierté québécoise s’est propagée plus rapidement que le virus. Même notre premier ministre François Legault, lors des premiers points de presse, l’a répété plusieurs fois : « Je suis pas mal fier d’être Québécois ».
On a besoin de sang ? Pas de problème. Le PM a juste à faire appel au peuple québécois, et voilà, on y va. On remplit les banques de sang.
On a besoin de bénévoles pour distribuer l’aide alimentaire ? Idem, pas de souci, juste à demander à la population de donner leur nom.
Il faut respecter les consignes de santé publique ? T’inquiète, nous sommes les champions, nous autres, quand vient le temps de suivre des consignes et d’écouter les grands patrons, figurant en haut de la liste de tous les états, qui plus est. Oui monsieur, de quoi être fier de notre nation.
Durant les premières semaines de cette pandémie, on s’est donc pété les bretelles. On avait confiance en nous, en notre société distincte. On allait montrer au monde entier, nous autres, comment on jugule ça, une méchante et virulente propagation… « Checkez ben ça, vous autres ! » La courbe, on va l’aplatir dans le temps de dire « COVID » ou « épidémiologique », exactement comme Horacio nous l'a montré à la télévision, en tapant allègrement sur sa main durant l'Horacio Show.
Pourtant, depuis le scandale de la résidence Herron et des autres CHSLD qui ont déboulé par la suite, la situation a nettement viré, en plus d'avoir changé le ton du fameux trio gouvernemental. Et force est de constater, aujourd’hui, que notre sentiment de fierté québécoise s’est effrité brusquement, dissipé dans le vent, faisant maintenant place à la honte, sans parler de cette crainte grandissante, tant des Montréalais eux-mêmes que d'une possible hausse fulgurante des cas d'infection dans notre région.
Même que depuis quelques semaines, il est devenu « un peu gênant » d’avoir à demander des bras à l’armée (canadienne, soit dit en passant) pour prêter main-forte dans les CHSLD.
C’est également un peu gênant de voir toutes ces femmes et ces immigrants au front, dans les tranchées des CHSLD, sous-payés depuis des années, mal traités, œuvrant dans des conditions de travail lamentables, voire inhumaines, en plus de l'incompétence administrative qui y règne.
Il est aussi gênant de constater que l’on compte également sur des immigrants pour travailler dans nos champs, pour récolter nos aliments, tout comme dans les abattoirs par ailleurs, bref, pour nourrir la population québécoise, pendant qu’on paye beaucoup de jeunes étudiants en bonne santé à rester à la maison à ne rien faire.
Et quant à la propagation de la COVID-19, finalement, on ne peut que regarder les chiffres du Québec avec désarroi, comparativement au reste du Canada, et rester pantois devant un tel constat, un désastre national.
Société distincte, disons-nous ? Certainement. Et « the Rest of Canada » doit rire (just a little) dans leur barbe, comme dans leur feuille d’érable.
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Photo : « La Place Jacques-Cartier, un dimanche après-midi », Montréal, 26 avril 2020.