La course à la chefferie du Parti libéral du Québec (PLQ) débute officiellement le 13 janvier, et les membres du parti, eux, éliront leur nouveau chef lors du Congrès à Québec le 14 juin prochain. Similairement aux femmes du milieu de l’humour qui dénonçaient le phénomène « pas de filles sur le pacing », il faut décrier l’absence de candidates féminines dans cette course à la chefferie du plus vieux parti politique du Québec. Non, Madame, « pas de femmes sur le pacing pour diriger le Parti libéral ». À ce jour, seuls des hommes se disputent la tête du parti rouge. Mais où sont les femmes au Parti libéral ? Le départ de la première femme à la tête du PLQ, Dominique Anglade, fût-il trop brutal ? Ou est-ce le parti libéral qui est devenu trop marginal ?
Des oppositions (très) masculines
Outre le PLQ, les autres partis de l’opposition, non plus, ne sont pas à l’abri de critiques féministes. Là encore, ce sont des hommes qui dominent le terrain du pouvoir et ça sent très fort la « norme-testostérone ».
Du côté de Québec solidaire, d’abord, rappelons que le parti orange, qui se targue pourtant d’être féministe à la base, a durement été secoué par une crise, en 2024, après le départ précipité de la co-porte-parole féminine Émilise Lessard-Therrien. Dans la foulée, la Commission nationale des femmes de Québec solidaire avait dénoncé « le muselage de la parole des femmes et "l’influence croissante de personnes non élues démocratiquement" au sein du parti », affirmant avoir tiré la « sonnette d’alarme à maintes reprises » après avoir reçu les « témoignages d’ex-candidates déçues, de membres démobilisées, de femmes de plusieurs circonscriptions, associations ou instances ». Malmené par cette saga, le co-porte-parole masculin et chef du deuxième groupe d’opposition, Gabriel Nadeau-Dubois, avait dû remercier des alliés de longue date de son entourage.
Quant au Parti québécois (PQ), maintenant, il ne brille pas non plus par sa présence féminine. Présentement, ce sont quatre hommes qui forment le troisième groupe d’opposition à l’Assemblée nationale. Aucune femme ne siège encore au Salon bleu (rouge pendant les rénovations).
Le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon, affirme vouloir atteindre la parité lors des prochaines élections au Québec, en présentant « un maximum de femmes dans des "comtés prenables" » en 2026. Ça reste à voir. L’atteinte de la parité semble beaucoup plus facile à dire qu’à réaliser. D’autant que plusieurs débats péquistes qui ont eu lieu sur la place publique au cours des derniers mois ont été menés par des hommes, des militants et des membres de longue date qui se parlent, s’obstinent et se répondent « entre eux » à coups d’interminables lettres ouvertes dans les journaux. Mais où sont les femmes indépendantistes du Parti québécois ? Leurs voix et leurs paroles seraient-elles, à elles aussi, muselées par des boys qui en mènent large au sein du parti bleu ? On pose la question.
Les coulisses sexistes du pouvoir politique
Depuis l’élection de la première femme à l’Assemblée nationale en décembre 1961, Claire Kirkland-Casgrain, les femmes ont investi en grand nombre le Parlement québécois. Du moins, statistiquement parlant.
Alors que plusieurs milieux de travail ont complètement été transformés par l’arrivée des femmes, modifiant par là même le langage et les façons de faire à l’interne, celui de l’Assemblée nationale, de toute évidence, n’a pas été bouleversé par la présence croissante des femmes. Au contraire. N’a qu’à lire l’ouvrage de l’excellente journaliste et ancienne correspondante parlementaire, Jocelyne Richer, Le sexe du pouvoir. Politique au féminin : élues et ex-élues brisent le silence (2024), pour constater que le pouvoir et ses manifestations sont demeurés essentiellement masculins.
En réalité, on a plutôt demandé aux femmes élues, ministres et députées, de s’adapter au monde viril de la politique, de jouer le jeu des garçons, en empruntant les codes agressifs et le langage sportif de « l’arène politique » ou du sport de combat extrême, en somme, de se comporter comme des hommes et d’avoir « des couilles », le vrai pouvoir se trouvant invariablement « dans le boys club qui entoure le chef du gouvernement ».
En lisant cet ouvrage de 2024, étrangement, nous vient immédiatement en tête Le panier de crabes (1971) de Jérôme Proulx, qui décrivait formidablement le règne des boys de la politique québécoise des années 1960-1970. On croyait que les choses avaient évolué depuis. Quelle naïveté !
Et si les hommes « amenaient LEUR game dans NOTRE game » ? comme disait l’autre. Et si les hommes du parlement québécois s’adaptaient à la présence des femmes plutôt que l’inverse ? Et si les échanges et les débats étaient moins agressifs, subversifs ou « musclés » pour faire place à plus d’écoute, de collaboration et d’humanité ?
Quoi, c’est utopique, mon affaire, vous dites ? Encore une idée de fifille ? On a bien le droit de rêver dans ce monde en perpétuelle mutation où le mélange des genres est pourtant à la mode. Chose certaine, le milieu de la politique a été créé par et pour des hommes qui s’appuyèrent pendant des siècles sur la « norme-testostérone ». Dorénavant, ça va prendre des gonades à l’Assemblée nationale.