Passer au contenu principal

Vapoter dans le métro


La scène se passe à la station de métro Pie-IX – ou « Pie-Nine » (Tarte No.9), comme disent les touristes et les anglos dans l’est de la ville. Mais elle aurait très bien pu se dérouler dans n’importe quelle station de la métropole, tellement ces épisodes sont devenus fréquents et habituels. 

Une jeune femme passe devant le guichet d’accès du métro, tout en vapotant. La courageuse employée de la Société des transports de Montréal (STM), derrière sa guérite vitrée (heureusement), avisa la contrevenante sur-le-champ : « Il est interdit de vapoter dans le métro, Mademoiselle ! » 

Mais « mademoiselle », elle, n’en a rien à faire des règlements de la STM, ni même de cet avertissement. Tout cela ne s’applique pas à elle qui veut vivre sa vie « full, genre ». Déterminée, et surtout effrontée jusqu’au bout de ses longs ongles colorés, la jeune femme lance un doigt d’honneur à l’employée de la STM et poursuit son chemin avec toute l’arrogance et l’importance d’elle-même qui l’habitent. 

Comme société ultra-individualiste et impolie, c’est là qu’on est rendus. Un peu partout dans la ville – comme dans le reste du monde, sans doute –, le civisme a disparu, la courtoisie a pris ses jambes à son cou. « La politesse ? Mais c’est fini, ça, Madame, la politesse ! », me confirma un chauffeur d’autobus avec qui je jasais récemment. Les gens ne sont pas juste à cran, ils sont agressifs, carrément. 

Ainsi donc, un peu partout dans les stations de la STM, tant sur les quais qu’à l’intérieur des habitacles sales du métro de Montréal, des gens vapotent tranquillement. Tenant discrètement leur cartouche de vapotage ou leur cigarette électronique dans le creux de leur main, ils aspirent un bon coup et voilà tout. Qui a dit qu’il n’y avait pas de fumée sans feu ? 

Dorénavant, dans les espaces publics, des effluves de toutes sortes circulent autour de nous. Des arômes de framboise épicée, de menthe givrée ou de fruits tropicaux embaument les lieux, si ce ne sont pas les odeurs de marijuana. On peut désormais « planer » en attendant le métro, chers usagers. « Merci d’avoir voyagé avec la STM ! » 

« Les délinquants du vapotage » 

Dernièrement, le journaliste Philippe Mercure nous apprenait qu’une « partie de l’industrie du vapotage », depuis six mois, « se moque ouvertement du nouveau règlement québécois interdisant les arômes dans les produits de vapotage ». « Rarement voit-on des commerces contourner des lois de façon aussi effrontée, flagrante, insolente », écrivait le chroniqueur. 

On pourrait dire exactement la même chose de plusieurs clients et utilisateurs qui fréquentent ces commerces délinquants. Si toute une industrie peut contourner des lois, de simples usagers peuvent certainement ignorer les règles de la STM – le vapotage étant bel et bien interdit dans les transports collectifs, tout comme le tabac et la cigarette.

De fait, la STM bannissait la cigarette électronique en 2015, sous peine d’une amende de 50$. Ironiquement, la Société des transports de Montréal profitait de cette révision de ses règlements pour interdire par la même occasion les insultes envers leurs employés : « Des paroles déplacées ou un doigt d’honneur pourraient ainsi valoir à leur auteur une amende de 75$ à 500$. »

Si les règlements avaient été appliqués ce jour-là, à la station de métro Pie-IX, « Mademoiselle » aurait écopé d’une amende d’une centaine de dollars ou plus. Le hic, dans ce cas-ci : il n’est simple pour les quelque 164 constables spéciaux de l’équipe de sécurité d’être partout en même temps. 

C’est dommage. Car mademoiselle aurait certainement eu besoin d’une belle leçon de vie, « genre ». Et on apprend habituellement très vite quand on en paye le prix.

Messages les plus consultés de ce blogue

Les Grands Ballets canadiens et la guerre commerciale américaine

La guerre commerciale «  made in USA  » est commencée. De toutes parts, on nous invite à boycotter les produits et les services américains. Quoi ? Vous songiez aller en vacances aux États-Unis cette année ? Oubliez ça ! Il faut dépenser son argent au Canada, mieux encore, au Québec. Dans ce contexte, on nous appelle également à boycotter Amazon (et autres GAFAM de ce monde) ainsi que Netflix, Disney, le jus d’orange, le ketchup, le papier de toilette, etc. – nommez-les, les produits américains –, en nous proposant, et ce un peu partout dans les médias québécois, des équivalents en produits canadiens afin de contrer la menace américaine qui cherche ni plus ni moins à nous affaiblir pour ensuite nous annexer. Les Américains sont parmi nous  Pourtant, les Américains sont en ville depuis longtemps. Depuis 2013, en effet, les Grands Ballets canadiens de Montréal (GBCM) offrent une formation américaine ( in English, mind you , et à prix très fort qui plus est) sur notre territo...

« Femme Vie Liberté » Montréal 2024 (photos)

Deux ans après la mort de Mahsa Amini, décédée après avoir été arrêtée par la police des mœurs pour le port « inapproprié » de son voile, le mouvement iranien « Femme Vie Liberté » se poursuit...  ----- Photos  : Sylvie Marchand, Montréal, 15 sept. 2024  À lire  :  Malgré la répression, de nombreuses Iraniennes ne portent pas de hijab ( La Presse , 14 sept. 2024)  Iran : deux ans après la mort de Mahsa Amini, la répression « a redoublé d’intensité » (Radio-Canada, 15 sept. 2024)

«Boléro» (2024), l’art de massacrer la danse et la chorégraphe

  Réalisé par Anne Fontaine ( Coco avant Chanel ), le film  Boléro  (2024) porte sur la vie du pianiste et compositeur français Maurice Ravel (Raphaël Personnaz) durant la création de ce qui deviendra son plus grand chef-d’œuvre, le  Boléro , commandé par la danseuse et mécène Ida Rubinstein (Jeanne Balibar). Alors que Ravel connait pourtant un certain succès à l’étranger, il est néanmoins hanté par le doute et en panne d’inspiration.  Les faits entourant la vie de Maurice Ravel ont évidemment été retracés pour la réalisation de ce film biographique, mais, étrangement, aucune recherche ne semble avoir été effectuée pour respecter les faits, les événements et, surtout, la vérité entourant l’œuvre chorégraphique pour laquelle cette œuvre espagnole fut composée et sans laquelle cette musique de Ravel n’aurait jamais vu le jour.  Dans ce film inégal et tout en longueur, la réalisatrice française n’en avait clairement rien à faire ni à cirer de la danse, des fai...

«La Belle au bois dormant», y a-t-il une critique de danse dans la salle ?

«  Sur les planches cette semaine  » …  «  La Belle au bois dormant  est un grand classique et, en cette époque troublée, anxiogène, la beauté des grands classiques fait du bien à l’âme. Particularité de la version que présentent les Grands Ballets à la Place des Arts cette année : c’est un homme (Roddy Doble), puissant, imposant, sarcastique, qui interprète la fée Carabosse, comme l’a voulu la grande danseuse et chorégraphe brésilienne Marcia Haydée » écrit la journaliste Marie Tison, spécialiste en affaires, voyage et plein air dans La Presse .  Qu’est-ce qui est pire ? Une compagnie de ballet qui produit encore des œuvres sexistes et révolues ? Un homme qui joue le rôle d’une femme (fée Carabosse), rôle principal féminin usurpé à une danseuse ? Ou une journaliste qui ne connait absolument rien ni à la danse ni aux œuvres du répertoire classique, incapable du moindre regard ou esprit critique, qui signe constamment des papiers complaisants de s...

Je me souviens... de Ludmilla Chiriaeff

(photo: Harry Palmer) La compagnie de danse classique, les Grands Ballets canadiens, a été fondée par une femme exceptionnelle qui a grandement contribué à la culture québécoise, Ludmilla Chiriaeff (1924-1996), surnommée Madame. Rien de moins. Femme, immigrante, visionnaire Née en 1924 de parents russes à Riga, en Lettonie indépendante, Ludmilla Otsup-Grony quitte l’Allemagne en 1946 pour s’installer en Suisse, où elle fonde Les Ballets du Théâtre des Arts à Genève et épouse l’artiste Alexis Chiriaeff. En janvier 1952, enceinte de huit mois, elle s’installe à Montréal avec son mari et leurs deux enfants – elle en aura deux autres dans sa nouvelle patrie. Mère, danseuse, chorégraphe, enseignante, femme de tête et d’action, les deux pieds fermement ancrés dans cette terre d’accueil qu’elle adopte sur-le-champ, Ludmilla Chiriaeff est particulièrement déterminée à mettre en mouvement sa vision et développer par là même la danse professionnelle au Québec : « Elle p...