Passer au contenu principal

La militante et le journaliste

Pas une semaine ne passe sans que j’emmerde quelqu’un quelque part. Que voulez-vous, il en est ainsi. C’est ça que ça fait, des militants. Ça milite, crisse. 

Depuis quelques années, je bombarde donc beaucoup de monde. J’envoie infatigablement des textes à des salles de rédaction pour qu’ils les publient dans leur journal. Je mitraille de courriels des politiciens, des organismes et des journalistes pour qu’ils parlent ou traitent d’un sujet. 

Je suis une guerrière qui cherche inlassablement la guerre et le combat. J’ai besoin de me battre. Sinon, plutôt mourir. Et comme les mots sont devenus mes seules véritables armes, j’envoie des courriels et des missives à gauche comme à droite.

Parfois, on publie. Parfois pas. Parfois, Untel me répond. D’autres fois, non. Cela ne change strictement rien à ma démarche, à ma manière de faire, à ma façon. C’est ça, la nécessité intérieure. Il faut simplement écouter son cœur. 

Dernièrement, la chance m’a souri et quelques-uns de mes textes en lien avec les petits travailleurs ont été publiés. Et comme ces mots paraissaient officiellement dans un vrai journal sérieux et rigoureux (corrigés de surcroît par des experts en la matière, et ce, gratuitement – ai-je mentionné la chance ?), j’en ai donc profité pour envoyer lesdites missives (lire missiles écrits) à des journalistes qui se spécialisent, eux, en finances et en économie. 

L’un d’eux, très sérieux, m’a répondu. Je ne dévoilerai évidemment pas le contenu du courriel, mais voici néanmoins des chiffres. Et comme ça provient d’une source plus que fiable et que ce journaliste jouit d’une crédibilité impeccable, c’est du béton, ces chiffres, je vous dis : « [P]rès de la moitié des Québécois ne font pas 30 000 $ par année. » 

Répétons la phrase svp : « [P]rès de la moitié des Québécois ne font pas 30 000 $ par année. » 

Plus loin, le talentueux et empathique journaliste ajoute : « Le premier ministre du Québec affirme qu'il veut créer des emplois en haut du salaire annuel moyen (56 000 $). C'est une cible légitime, mais on ne peut pas oublier, pour autant, la situation des 46 % de Québécois qui touchent moins de 30 000 $ ou les 70 % qui touchent moins de 50 000 $ par année. » 

Alors je me demande maintenant, on attend quoi, au juste, pour emmerder le PM du Québec François Legault à ce sujet ? 

*** 

Les militants militent, les artistes, eux, doivent exercer leur métier, pratiquer leur art. Lire l’article de Catherine Lalonde, « Hors des écrans, forte baisse des revenus des artistes » (Le Devoir, 13 jan. 2022). 

-----

Photo : Sylvie Marchand, murale et graffiti dans Hochelag, Montréal, 25 déc. 2021. (Oui, oui, la journée "Fuck Noël".)

Messages les plus consultés de ce blogue

Mobilité vs mobilisation

On aime parler de mobilité depuis quelques années. Ce mot est sur toutes les lèvres. C’est le nouveau terme à la mode. Tout le monde désire être mobile, se mouvoir, se déplacer, dans son espace intime autant que possible, c’est-à-dire seul dans son char, ou encore dans sa bulle hermétique dans les transports collectifs, avec ses écouteurs sur la tête, sa tablette, son livre, son cell, des gadgets, alouette. On veut tous être mobile, être libre, parcourir le monde, voyager, se déplacer comme bon nous semble. On aime tellement l’idée de la mobilité depuis quelque temps, qu’on a même, à Montréal, la mairesse de la mobilité, Valérie Plante. On affectionne également les voitures, les annonces de chars, de gros camions Ford et les autres - vous savez, celles avec des voix masculines bien viriles en background - qui nous promettent de belles escapades hors de la ville, voire la liberté absolue, l’évasion somme toute, loin de nos prisons individuelles. Dans l’une de ces trop nombre

Femmes consommables

Elles ne datent pas d’hier, ces maudites pubs à marde. Mais lorsque j’ai aperçu celle-ci, au début de l’été, cette gigantesque publicité de bières au métro McGill, j’ai pensé, comme une vraie hurluberlue habitant toujours la planète Utopie  : «  Pfft ! Ça ne passera jamais ! Dans l’temps de l’dire, ces affiches seront recouvertes de collants "pub sexiste" que les féministes apposent ici et là, au centre-ville de Montréal. Check ben ça… ! » Je suis repassée maintes fois devant depuis, jamais vu un seul collant, sapristi. Neuf femmes consommables, mesdames et messieurs – neuf ! un vrai harem –, bien fraîches évidemment, et de préférence « à prendre » sur le bord d’un lac quelque part pendant vos vacances : la Brise du lac , la Ci-boire , la Matante , la Désirée , la Chipie , la Valkyrie , la Joufflue , la Belle Mer – quelqu’un devrait définitivement aller consulter –, ou encore la Nuit blanche – j’imagine que, comme Brise du lac , elle aussi n’est que de passage… I

Je me souviens... de Ludmilla Chiriaeff

(photo: Harry Palmer) La compagnie de danse classique, les Grands Ballets canadiens, a été fondée par une femme exceptionnelle qui a grandement contribué à la culture québécoise, Ludmilla Chiriaeff (1924-1996), surnommée Madame. Rien de moins. Femme, immigrante, visionnaire Née en 1924 de parents russes à Riga, en Lettonie indépendante, Ludmilla Otsup-Grony quitte l’Allemagne en 1946 pour s’installer en Suisse, où elle fonde Les Ballets du Théâtre des Arts à Genève et épouse l’artiste Alexis Chiriaeff. En janvier 1952, enceinte de huit mois, elle s’installe à Montréal avec son mari et leurs deux enfants – elle en aura deux autres dans sa nouvelle patrie. Mère, danseuse, chorégraphe, enseignante, femme de tête et d’action, les deux pieds fermement ancrés dans cette terre d’accueil qu’elle adopte sur-le-champ, Ludmilla Chiriaeff est particulièrement déterminée à mettre en mouvement sa vision et développer par là même la danse professionnelle au Québec : « Elle portait en