Beaucoup d’encre a coulé depuis l’élection du président américain « téflon » – car rien, absolument rien n’a collé sur cet homme narcissique aux propos grossiers, misogynes, racistes, vils. En plus des discours masculinistes qui circulent abondamment, il n’est pas facile d’être femme ni féministe ces jours-ci. Après des décennies de combat pour les droits et l’égalité des femmes, la situation est particulièrement pénible et décourageante.
Personnellement, j’en veux aussi à la gauche. Que vous l’appeliez la « gauche radicale » ou « l’extrême gauche », les partis politiques de gauche ont non seulement abandonné les travailleuses et les travailleurs, les ouvriers, les pauvres, leurs voisins et les indigents, mais, généralement parlant, sont totalement déconnectés des enjeux qui préoccupent réellement la majorité de la population.
Et cette gauche (à laquelle je m’identifiais auparavant) devrait entreprendre un sérieux exercice d’introspection. Car bon nombre d’entre nous avons tout simplement décroché du discours ambiant et dominant des dernières années, afin d’amorcer, bien malgré nous, un virage vers le centre, voire la droite.
Les combats de la gauche
Féministes ou non, toutes les femmes ne pensent pas la même chose. Il en est de même avec les féministes en général, femmes et hommes, qui ne forment pas, eux non plus, un bloc monolithique, même si, fondamentalement, nous défendons ardemment l’égalité entre les femmes et les hommes.
Or, toutes les femmes ne croient pas que l’éradication des sexes biologiques pour adopter les théories de genre, comme la fluidité des genres, est une bonne chose, ni un progrès. Tant s’en faut. Plusieurs personnes, femmes et hommes, trouvent que l’application de certains de ces concepts dans la sphère publique va beaucoup trop vite.
Toutes les femmes ne croient pas que l’écriture inclusive est une avancée pour « toustes ». Au contraire, elle fait disparaître les femmes, le genre féminin.
Toutes les femmes ne croient pas que des toilettes non-genrées constituent en soi un progrès ou un avancement pour la société, à commencer par la protection des femmes elles-mêmes. Plusieurs femmes craignent de se retrouver dans une toilette publique où des hommes sont présents. Mais qui écoute ces femmes ?
Toutes les femmes ne croient pas que les athlètes trans devraient participer à des compétitions féminines, pas plus que des trans ne devraient se retrouver dans des prisons pour femmes, et ce, basé sur un simple ressenti et quelques hormones.
Toutes les femmes ne croient pas que le port du voile islamique est « badass », comme l’affirmait gauchement l’ancienne présidente de la Fédération des femmes du Québec (FFQ), Gabrielle Bouchard, la première présidente trans de la FFQ et « femme d’influence en droits de la personne », selon le ministère Femmes et Égalité des genres du gouvernement canadien. Déconnecté des femmes comme de la majorité de la population, vous dites ? Et qui, aujourd’hui, porte attention à la FFQ, jadis un organisme féministe crédible et pertinent pour le mouvement des femmes au Québec ? Un autre recul pour les Québécoises.
Toutes les femmes ne croient pas que les religions sont des « cultures » comme les autres à respecter. Quelle absurdité ! Ce mot fourre-tout sert trop souvent de paravent à nombreux mouvements religieux prosélytes, sexistes et discriminatoires, alors que nous avons justement choisi, comme société égalitaire, une séparation claire entre l’État et les religions. Toutes les religions. De fait, les religions, leurs lois, leurs valeurs ainsi que nombreuses pratiques religieuses favorisant la ségrégation des sexes ou encore la soumission supposée des femmes sont rarement compatibles avec le féminisme.
Toutes les femmes ne croient pas que la Loi 21 sur la laïcité de l’État va trop loin. Bien au contraire. Même contestée par plusieurs groupes et individus, cette loi manque de mordant et devrait s’appliquer à tous les élèves et étudiants qui fréquentent les écoles et les institutions publiques au Québec – alors que des étudiantes et des jeunes femmes se présentent dans des cégeps et des universités, tout comme au centre-ville de Montréal en général, portant un niqab ou autre voile islamique intégral.
Toutes les femmes ne croient pas que les droits individuels ont préséance sur les droits collectifs. Les espaces publics, comme les parcs, les rues, un aéroport ou encore un banal centre commercial, ne devraient jamais servir de lieu de prière ni à aucune autre pratique religieuse, d’ailleurs.
Toutes les femmes et tous les hommes, qu’il se disent féministes ou non, ne sont pas actifs sur les réseaux sociaux et n’ont aucune tribune pour exprimer clairement leur désaccord avec certaines positions radicales de la gauche. Plusieurs préfèrent d’ailleurs se taire sur bon nombre de ces sujets, ne pas s’exprimer publiquement (mais plutôt à voix basse, lors d’une conversation face à face), car ils savent très bien qu’ils seront sur-le-champ accusés d’être intolérants, « transphobes », « islamophobes », xénophobes, et quoi encore.
Non, même féministes, toutes les femmes et tous les hommes ne pensent pas pareil.