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L’annus horribilis caquiste


L’année n’est pas encore terminée mais, à quelques jours seulement de la fin des travaux parlementaires, on peut affirmer sans se tromper que 2023 fut sans contredit l’annus horribilis du gouvernement caquiste. Après avoir trôné dans les sondages depuis son élection en 2018, la Coalition avenir Québec (CAQ) est en baisse de popularité, et le premier ministre François Legault lui-même en arrache. Disons-le franchement, depuis des mois maintenant, la situation caquiste est particulièrement « di’icile ». Mais que s’est-il passé, ma foi ? 

Bonne année 2023 ! 

L’année avait pourtant bien commencé alors que le parti de M. Legault avait obtenu un « mandat fort », avec 90 députés élus en octobre 2022, lui permettant ainsi de régler des gros dossiers, et même, de réaliser de grandes choses pour le Québec. Or, la débandade de la CAQ a débuté au printemps dernier. 

En mars, malgré l’incertitude économique et les avis contraires de nombreux experts, le gouvernement caquiste a décidé d’aller de l’avant avec sa promesse électorale de réduire les impôts de 1 point de pourcentage sur les deux premiers taux d'imposition, bénéficiant ainsi à 4,6 millions des 6 millions d’adultes québécois. Cet allègement du fardeau fiscal des mieux nantis du Québec prive désormais les coffres du trésor public de quelque 1,7 milliard de dollars annuellement – des pertes de revenus colossales et irrécupérables, minant sérieusement la « capacité de payer » de l’État. 

Ensuite, en avril, blindée d’immenses cartables, la redoutable ministre des Transports et de la Mobilité durable, Geneviève Guilbault, est venue annoncer l’abandon du troisième lien dans la région de Québec.  Une promesse pourtant phare durant la campagne électorale de la CAQ en 2022. Promesse d’ivrogne ou mise en scène électoraliste ? Les doutes s’installent. 

En mai, maintenant, les députés de l’Assemblée nationale ont décidé à très forte majorité de s’autooctroyer une généreuse augmentation de salaire de 30%. À la fois confiant et arrogant, M. Legault avait déclaré haut et fort qu’il fallait du « courage » pour agir de la sorte. Par la même occasion, son bras droit de longue date et chef de cabinet, Martin Koskinen, a eu droit, lui, à un impressionnant « rattrapage » salarial de quelque 71 000$ en un an. « Rattrapage » ou copinage ? Les déceptions s’accumulent. 

« Un automne chaud » 

Dès la rentrée parlementaire, on nous avait prévenu que l’automne serait « chaud », M. Legault invitant « les syndiqués à se montrer raisonnables face aux offres du gouvernement ». Sans sourciller, le premier ministre évoqua la « capacité de payer » de l’État. 

Mais depuis octobre, toutefois, rien ne va plus. Les bévues se multiplient et la dégringolade de la CAQ se poursuit. Depuis leur cuisante défaite dans Jean-Talon, en effet, la CAQ et leur chef semblent constamment en mode panique ou « mauvaise décision-mauvaise réaction ». Ça sent constamment l’improvisation – la résurrection du mégaprojet du troisième lien en est un bel exemple –, donnant sans cesse l’impression à la population que M. Legault dirige à tâtons, au gré des sondages, de ses états d’âme et de ses émotions. Qui l’aurait prédit ? 

Et puis, en novembre, finalement, ce fut la totale. Quelques jours seulement après nous avoir averti, l’air grave, lors de sa mise à jour économique, que « les six prochains mois ser[aie]nt difficiles », le ministre des Finances, Eric Girard, nous annonçait fièrement que le gouvernement caquiste allait dépenser entre 5 et 7 millions de fonds publics pour deux matchs de hockey parfaitement inutiles des ultrariches Kings de Los Angeles, à Québec, en 2024. Pendant que beaucoup de Québécois ne mangent pas à leur faim, en pleine négociation avec les travailleurs du secteur public, cette annonce semblait trop grosse à avaler. Un gouvernement déconnecté de la réalité du peuple québécois, vous dites ? Or, sans pain, point de jeux, monsieur le ministre. 

Et tout cela, mesdames et messieurs, en lisière d’une année extraordinaire marquée par l’inflation, une hausse fulgurante des prix (aliments, loyer, essence, etc.), une demande explosive d’aide alimentaire au Québec, une crise du logement qui frappe toutes les régions du Québec, une hausse de l’itinérance, une grogne générale dans la population (les gens ont faim), une énième réforme en Santé, des services publics affectés, les déboires de la SAAQ, le sous-financement du transport collectif, la crise des médias, etc. – nommez-les, les crises –, sans oublier le verglas, les feux de forêts, le smog, les pluies diluviennes, des inondations à répétition et d’autres coûteuses conséquences liées au réchauffement planétaire et à la crise climatique. Non, ça ne va pas bien. Même que ça va assez mal. 

Toutefois, le premier ministre du Québec François Legault promet « de faire mieux ». On se le souhaite sincèrement. Car l’année 2023 de la Coalition avenir Québec ne fut en rien « croquignolesque ».

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