Ce gouvernement très majoritaire de la Coalition avenir Québec (CAQ), au sommet duquel trône le chef et premier ministre François Legault, est sans contredit à l’image du Québec : consensuel, tranquille et bleu pâle caquiste virant sur l’aqua – plus dilué que ça, c’est semi-transparent.
Non, on ne fait pas de vagues à la CAQ comme au Québec. Les membres, les ministres, les députés et les délégués de ce parti savent rentrer dans les rangs, quitte à être plates, ennuyants, sans colonne vertébrale et sans éclats.
Pas de chicane dans ma cabane, comme on dit, pas de cochon dans mon salon non plus et, surtout, pas de bisbille dans la famille. Icitte, on n’aime pas ça. Dans ce « petit Québec », cette « belle province », on n’aime ni les altercations, ni les confrontations, ni les discussions trop corsés, encore moins les interminables argumentations. Mieux vaut suivre comme des moutons. Et c’est ce qu’ont gentiment fait les pseudos militants de la CAQ durant ce congrès qui se tenait à Sherbrooke la fin de semaine dernière. Ils sont restés dociles, soumis, silencieux derrière leur chef, sages comme des images.
Sans rien contester ni exprimer, les membres de la CAQ, qui ressemblent plus à un fan club qu'à un parti politique, se plient aux moindres variations humorales de leur puissant chef patriarcal et provincial, M. François Legault, fondateur du parti, père symbolique et grand représentant d’une nation gentille et silencieuse. Zéro bisbille, zéro révolution (même tranquille) à l’horizon. Plus « suiveux » que ça, tu rampes sans doute sous un tapis.
Dire qu’un bon nombre d’anciens indépendantistes ont pilé sur leurs profondes valeurs et convictions pour rejoindre ce parti de « gagnants », troquant ainsi leur rêve ultime de construire un pays pour une belle limousine avec, en prime, une « courageuse » augmentation de salaire de 30% – pendant que des travailleurs au Québec peinent à joindre les deux bouts et sont toujours en négociation avec ce gouvernement pour quelques dollars. C’est du beau.
Les grandes ambitions de la CAQ ? Les valeurs que ce parti incarne et qu’il est prêt à défendre corps et âme ? On ne sait pas trop. Ce gouvernement de la continuité – oui, oui, « continuons » – emprunte tantôt aux libéraux, tantôt aux péquistes, tantôt aux solidaires, bref, ce qui fait leur affaire. Un parti caméléon, somme toute, capable de changer de couleur pour mieux se fondre au décor sans rien bousculer.
La seule véritable priorité de François Legault, voire son obsession : réduire l’écart de richesse entre le Québec et l’Ontario. Tout un projet de société. Pour le reste, bof, on verra, on verra. « Continuons » pendant ce temps sans aucune direction mais avec un chef et un mandat forts !
Que ce Québec est mou et tristement tranquille.