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Le «mouvement» entravé de Québec solidaire


Au terme d’une autre session parlementaire mouvementée, au Salon rouge, cette fois, de l’Assemblée nationale, chaque chef de parti a offert son bilan, de même que sa vision et ses priorités pour les mois à venir. 

La nouvelle porte-parole de Québec solidaire, Ruba Ghazal, dont l’élection (ou couronnement) en novembre dernier fut assombrie par son collègue peu solidaire, Haroun Bouazzi, nous assure que « malgré les douze mois de turbulences et "contrairement aux apparences", Québec solidaire termine l’année "uni" ». Pourtant absent de l’Assemblée nationale, le député Haroun Bouazzi n’avait toujours pas réintégré les rangs du parti, « poursuivant [quant à lui] la pause qu’il avait entamée il y a deux semaines dans la foulée de la controverse générée par ses propos. » 

N’empêche. Pendant le congé parental de GND, Ruba Ghazal, elle, est là. Tenace et déterminée, elle tient le fort et le flambeau du parti orange, et on ne doute aucunement de ses capacités comme de ses compétences. 

En revanche, Mme Ghazal a également affirmé, durant ce bilan, qu’à titre de « seule femme à la tête d’un parti politique aujourd’hui en 2024 », elle souhaitait mettre les droits des femmes au centre de ses priorités – ce qui, en soi, est très bien. « Je me sens portée […] par la voix des femmes au Québec, a-t-elle souligné. François Legault, on le sait aussi, les droits des femmes, ce n’est pas sa priorité. Donc il y a quelque chose aussi là-dedans : que Québec solidaire soit le rempart pour l’égalité entre les femmes et les hommes. » 

Ce sont là de belles intentions. Mais Québec solidaire comme « rempart pour l’égalité entre les femmes et les hommes » ? Laissez-moi sérieusement en douter. Pour s’approcher ne serait-ce que d’un iota d’un début de vérité à cette affirmation, il faudrait que Ruba Ghazal, Québec solidaire et, surtout, ses membres, militants et délégués reviennent à la base et ancrent leurs pieds dans les faits et la vraie réalité. 

Les faits et la réalité 

Quels sont les faits ? D’abord, l’égalité entre les femmes et les hommes est non seulement une valeur fondamentale, primordiale et non-négociable au Québec, mais elle passe, entre autres choses, par la laïcité de l’État et de nos institutions publiques. Les religions, comme on le sait, toutes les religions, sont fondamentalement sexistes. Dans ce cadre, bon nombre de pratiques religieuses sont donc elles aussi essentiellement discriminatoires, sexistes, voire misogynes, promouvant notamment la ségrégation des femmes et des hommes, tout comme l’oppression et l’effacement des femmes dans l’espace public carrément. Par conséquent, les religions, leurs lois, leurs valeurs et les pratiques religieuses sont rarement compatibles avec les revendications féministes. 

La réalité, maintenant ? La réalité sur le terrain de la démocratie québécoise est que la majorité des Québécoises et des Québécois sont en faveur de la Loi 21 sur la laïcité de l’État. Mais le parti politique supposément « solidaire », lui, a décidé d’aller à l’encontre de cette majorité, pire, d’ignorer totalement la voix du bon peuple et de s’en remettre uniquement à ses membres, militants et délégués qui, eux, jugent cette loi discriminatoire. C’est le monde à l’envers et le renversement idéologique. 

Pis encore, Québec solidaire choisit sciemment, contrairement à la volonté populaire, de défendre le port des signes religieux au Québec, incluant pour les employés de l’État. Êtes-vous vraiment prêts à gouverner, chers solidaires ? Et vous osez appeler cela un « rempart pour l’égalité entre les femmes et les hommes », vraiment ? 

Comment un parti politique qui aspire un jour à gouverner, après avoir annoncé un virage « pragmatique » de surcroît, peut-il à ce point demeurer sourd à la volonté des citoyennes et des citoyens, à la majorité du peuple québécois ? N’est-ce pas là la base même de la démocratie ? 

Or, Québec solidaire n’est pas un parti politique comme les autres. C’est d’abord un « mouvement ». Un « mouvement », comme on le sait, entravé en son centre par une poignée d’individus radicaux, un noyau dur de militants et de délégués qui tiennent absolument à faire respecter leur propre agenda et ainsi mener les rênes du parti. Cette force militante, comme on l’observe depuis quelques années, est largement déconnectée des priorités de la population, des enjeux qui préoccupent véritablement les Québécoises et les Québécois. En d’autres mots, les solidaires sont solidaires seulement avec celles et ceux qui pensent comme eux et non pas avec la majorité de la population. 

Mouvement vs stagnation 

Ainsi ankylosé en son sein comme à sa racine par des groupuscules qui pèsent lourd, très lourd dans la balance du pouvoir, le « mouvement » solidaire n’avance plus depuis 2019, lorsque le parti a refusé d’appuyer la loi sur la laïcité de l’État. Depuis, ce « mouvement » ne progresse plus. Freiné, paralysé de l’intérieur, ce n’est plus un mouvement mais une stagnation. Cette inertie, ce piétinement, cet arrêt, cet immobilisme se reflète d’ailleurs dans les sondages et les intentions de vote de la population. 

Pour avancer, un vrai « mouvement » doit être à l’écoute de la population en général, pas juste de ses membres et de ses militants, et pointer dans la bonne direction. Cela commence par un appui fort pour la laïcité de l’État et une interdiction claire du port de signes religieux dans nos institutions de tous les employés. Voilà la première pierre, fondamentale, d’un véritable rempart pour l’égalité entre les femmes et les hommes.


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