Passer au contenu principal

L’art (peu subtil) d’acheter des votes


Beaucoup d’analyses ont été faites depuis les élections du 3 octobre dernier au Québec, notamment à propos du mode de scrutin. C’est très bien. 

Or, un élément plutôt fondamental semble avoir été omis, étonnamment, concernant cette élection, LE sujet – et même la question de l’urne pour bon nombre de citoyens dans ma circonscription –, qui était sur toutes les lèvres d’une tranche importante et moins nantie de la population : les « chèques » de M. Legault. 

La campagne électorale a débuté le dimanche 28 août dernier en vue du scrutin le 3 octobre suivant. Le premier ministre sortant François Legault, qui demandait un deuxième mandat aux Québécois, affirmait que « l’économie du Québec se porte bien, alors que la province a réduit son écart de richesse avec l’Ontario. » Son obsession première, soulignons-le au passage, c’est écrit de long en large dans son beau livre (comptable) Cap sur un Québec gagnant paru en 2013. 

Il ajoutait ensuite : « "Posez-vous la question : qui voulez-vous qui gère votre portefeuille dans les quatre prochaines années ? À quelle équipe économique faites-vous le plus confiance ?" […] essayant au premier jour de la campagne électorale d’influencer la question de l’urne. » 

Un vote, un chèque 

Dès le lendemain, lundi 29 août donc, « François Legault dévoil[ait] le montant du prochain chèque distribué aux Québécois » afin de nous aider à faire face à l’inflation, « promettant d’envoyer entre 400 et 600 $ aux contribuables d’ici la fin de l’année. »

Autrement dit, « si nous sommes réélus en octobre, on va vous envoyer des chèques en décembre ». Fou d’une poche.  

Pour bon nombre d’électeurs qui peinent sérieusement à joindre les deux bouts et à manger à leur faim depuis des mois, la campagne électorale était déjà pas mal terminée. À moins d’un revirement phénoménal de situation, plusieurs citoyens souhaitaient simplement recevoir leur « cadeau de Noël » en décembre promis dès le mois d’août. 

Et attendez, ce n’est pas tout.  

À deux jours des élections, qui plus est, pour être bien certain que tout le monde a compris le message, le « Père Noël » Legault, qui s’était pointé le nez en août, réitère son engagement pour décembre et nous le répète fièrement : « J’ai une équipe qui est prête à vous servir, j’ai envie de vous servir et si on est réélu on va, dès le mois de décembre, on va vous envoyer un chèque de 400$ à 600$ et les personnes âgées vont recevoir un 2000$ de plus, on va aussi baisser les impôts, donc vous pouvez compter sur moi, mais je compte sur vous lundi ». C’est clair, non ? 

Ce n’est pas seulement l’art très peu subtil d’acheter des votes, c’est instrumentaliser honteusement et de manière on ne peut plus grossière les difficultés financières, économiques et alimentaires d’un nombre époustouflant de simples citoyens qui survivent de peine et de misère dans le seul but de marquer des points politiques et d’être réélu. 

Après le « bouclier anti-inflation » de la CAQ, il aurait fallu mettre en place un « bouclier anti-manipulation » pour la population la plus vulnérable du Québec. Petite misère.

Messages les plus consultés de ce blogue

Comme une écœurantite aiguë

  Il n’avait pas encore été assermenté qu’on était déjà tanné, épuisé, saturé. La campagne électorale américaine fut longue et, en réalité, il n’avait pas vraiment cessé de parler depuis sa défaite en 2020 et son coup d’État raté du 6 janvier 2021, l’assaut du Capitole.  C’est une sorte de diarrhée verbale qui ne finit plus de couler, de miner notre existence, de salir et d’empester notre vie au quotidien. Par moments, il est même difficile de respirer profondément.  Le 31 octobre dernier, quelques jours avant les élections américaines, régnait alors une ambiance effroyable, lourde, palpable. Ce n’était pas à cause de l’Halloween. Enfin, pas seulement. Cette ambiance n’a pas disparu depuis. Au contraire, elle a empiré. Elle s’est gonflée et s’est gravement alourdie.  ***  Depuis la réélection du président orange, le 5 novembre dernier, on appréhendait le pire. Pendant des semaines, ce fut le calme plat. Un calme grisâtre, lourd et assourdissant avant la tempête ...

«La Belle au bois dormant», y a-t-il une critique de danse dans la salle ?

«  Sur les planches cette semaine  » …  «  La Belle au bois dormant  est un grand classique et, en cette époque troublée, anxiogène, la beauté des grands classiques fait du bien à l’âme. Particularité de la version que présentent les Grands Ballets à la Place des Arts cette année : c’est un homme (Roddy Doble), puissant, imposant, sarcastique, qui interprète la fée Carabosse, comme l’a voulu la grande danseuse et chorégraphe brésilienne Marcia Haydée » écrit la journaliste Marie Tison, spécialiste en affaires, voyage et plein air dans La Presse .  Qu’est-ce qui est pire ? Une compagnie de ballet qui produit encore des œuvres sexistes et révolues ? Un homme qui joue le rôle d’une femme (fée Carabosse), rôle principal féminin usurpé à une danseuse ? Ou une journaliste qui ne connait absolument rien ni à la danse ni aux œuvres du répertoire classique, incapable du moindre regard ou esprit critique, qui signe constamment des papiers complaisants de s...

Scandale culturel - dossier

S’il s’agissait d’une compagnie minière, on parlerait de contamination des sols, de pollution de l’air et des rivières, d’exploitation des femmes, etc. Mais puisqu’il est question d’une compagnie de ballet, on y voit que du feu, des tutus et d’étincelantes paillettes. Voici l’histoire (inachevée) d’une institution québécoise élitiste et racoleuse qui ravage notre culture, tout en recevant des fonds publics. Bienvenue au pays d’Oz. La mise en scène, ou, les coulisses du sous-financement culturel  Le récit débute peu de temps après le tsunami économique provoqué par les bandits de Wall Street : « … au beau milieu de la récession qui suivit la crise de 2008, Raymond Bachand se fit le promoteur d’une nouvelle "révolution culturelle". Rien de moins! Celle-ci visait le rapport entre le citoyen et l’État et consistait d’abord à habituer le premier – car la culture est beaucoup une question d’habitude – à exiger moins du second pour qu’il développe le réflexe de chercher...

8 mars, voir rouge à Montréal (photos)

Il y avait des femmes, des hommes, des enfants, des chiens. Il y avait des messages, de la rage, des spécialistes de politique américaine. Il y avait des chants, des performances, des costumes pis des pancartes. Il y avait de tout, quoi. Même de l'espoir...  ----- Photos  : Sylvie Marchand, manif 8 mars 2025, devant le Consulat des États-Unis à Montréal. Fil de presse  :  Des chaînes humaines formées à travers le Québec  Pour dénoncer Donald Trump: manifestations à travers le Québec   Des Québécoises réunies contre les politiques de Donald Trump Des chaînes humaines pour défendre les droits des femmes et s'opposer à Trump

Faire bouger le monde. N'importe comment.

Casse-Noisette s'en vient et les nombreuses publicités qui ont envahi la ville de Montréal depuis quelques semaines provoquent chez moi de l'urticaire, en plus d'une forte bouffée de chaleur frôlant la syncope. Non, ce n'est pas la ménopause (je vous emmerde), mais toutes les insidieuses opérations de marketing qui rognent notre culture, notre langue et notre pouvoir décisionnel me font clairement voir rouge. Je ne parle pas du spectacle lui-même - ni de  « l'accommodement   » du pauvre gérant de la boutique Adidas  ou même de la scandaleuse entente de Mélanie Joly avec Netflix -, mais bien du  Boys Club  des Grands Ballets canadiens de Montréal. Oui, oui, la compagnie de ballet classique à l'image féerique. Une autre belle illustration de la suprématie machiste, exemple parfait qui pourrait servir au cours universitaire «  Marketing  patriarcal et instrumentalisation des femmes   », s'il en était un. En gros, le concept es...