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Ces jeunes femmes ultra voilées

Elles sont de plus en plus nombreuses sur l’île de Montréal. Un peu partout, dans la ville, elles se multiplient dans l’espace public. Elles sont clairement visibles à toutes celles et ceux qui lèvent les yeux de leur cellulaire. Et cette visibilité soudaine, est-elle intentionnelle ? 

Ces jeunes femmes portent, non pas le hidjab, le voile islamique, mais bien l’abaya – soit un long vêtement traditionnel musulman couvrant tout le corps féminin. Couvertes de la tête au pied, ces jeunes femmes sont ultra voilées. Elles sont dans le métro ou se promènent au centre-ville de Montréal. Mais celles que l’on voit régulièrement fréquentent pour leur part un cégep à proximité. Elles ont quoi, 17, 18, 19 ans ? 

En France, ils ont définitivement réglé ce problème. En août 2023, lors de la rentrée scolaire, la France avait annoncé l’interdiction du port de l’abaya et des vêtements religieux dans les écoles françaises. De fait, c’est l’ancien ministre français de l’Éducation nationale Gabriel Attal (devenu premier ministre de France depuis et de passage au Québec cette semaine) qui en avait fait l’annonce. Lors de sa conférence de presse pour la rentrée des classes à l’automne 2023, M. Attal avait annoncé que le gouvernement français avait décidé de « faire bloc » contre les atteintes à la laïcité, en interdisant le port de l’abaya dans les écoles françaises, de même que le qamis, version masculine de ce vêtement religieux.

« "Faire bloc, c’est être clair : l’abaya n’a pas sa place dans nos écoles", a poursuivi M. Attal, en promettant de former "aux enjeux de laïcité 300 000 [membres du personnel] par an jusqu’en 2025" et l’ensemble des 14 000 membres de direction d’ici la fin de l’année. »

Chez nos cousins de l’Hexagone, on a donc pris très au sérieux ce phénomène croissant du port de vêtements religieux dans les écoles. On parlait même d’« attaque politique » : « "Notre école est testée. Ces derniers mois, les atteintes à la laïcité se sont considérablement accrues, avec notamment le port de tenues religieuses, comme les abayas [pour les femmes] ou les qamis [pour les hommes], qui ont fait leur apparition — et se sont installées parfois — dans certains établissements", a fait valoir [l’ancien] ministre de l’Éducation nationale. »

Pendant ce temps, ici, au Québec, que dit-on ? Rien. Personne à l’Assemblée nationale ne semble vouloir parler de ce problème rampant, ni même le nommer. De peur, sans doute, de froisser des sensibilités et quelques minorités. Par crainte d’être taxés d’islamophobie, de xénophobie, de la peur de « l’Autre » comme celle des « étrangers ». 

Or, le Québec est une société distincte, laïque et féministe. Comme société, nous avons choisi l’égalité entre les femmes et les hommes. Et comme en France, nous avons, nous aussi, choisi la laïcité comme une des « valeurs fondamentales » de nos écoles et de nos institutions. Nous avons sorti la religion des écoles et des lieux d’enseignement. Nous ne voulons pas non plus de signes religieux ostentatoires au sein de nos institutions. Non, il n’est pas possible d’accueillir des groupes de prières, entre les murs d’une école, pas plus qu’on ne peut offrir des locaux de « recueillement » à ceux qui en font la demande.

Comme en France, et ailleurs en Europe, cette nouvelle mode religieuse très ostentatoire chez les jeunes femmes musulmanes semble vouloir s’installer ici. Comme si, en effet, depuis quelques années, des jeunes femmes musulmanes s’étaient donné le mot d’ordre d’être plus nombreuses et, surtout, plus visibles dans l’espace public québécois.

C’est effectivement une attaque politique et un affront à notre société laïque. Ce phénomène est rampant, inquiétant et pernicieux. Il est temps d’agir. Car manifestement, « il se passe quelque chose » dans la grande région de Montréal.

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Photo : Sylvie Marchand, Montréal

*Ajout : Gabriel Attal souligne l'importance de la laïcité, Le Devoir, 11 avril 2024. 

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